Ma dernière (… et première) chronique finissait sur la promesse de rédiger une chronique mensuelle. Force est de constater que j’ai tenu toutes mes promesses en vous livrant cette chronique mensuelle… du mois d’août 2015 ! Pour les pointilleux et les mauvaises langues, la précédente datait d’octobre 2014 donc les délais sont quasi respectés. A côté de ceux annoncés pour l’achèvement de la Sagrada Familia, je suis même largement en avance !
J’ai décidé cette fois de changer un peu mon fusil d’épaule et de ne plus vous proposer de lectures uniquement pour adultes mais bien pour adultes et enfants. En fait, il serait plus juste de dire pour adultes sur les enfants !
Tout d’abord une bande dessinée : Ce n’est pas toi que j’attendais de Fabien Toulmé.
Récit autobiographique où l’auteur partage avec nous une période qui va complètement chambouler son existence : l’arrivée de son deuxième enfant, Julia, atteinte d’une trisomie 21 non détectée pendant la grossesse.
On suit le couple pendant la grossesse, on l’accompagne pendant l’accouchement et on assiste ensuite aux trois premières années de Julia, au chamboulement que constitue l’annonce de la maladie, au parcours du combattant médical obligatoire (cardiologues, psychologues, kinésithérapeutes, etc.) mais aussi à la naissance bien difficile de l’amour d’un père pour sa fille…
Fabien Toulmé fait preuve d’une incroyable honnêteté dans son récit. Il ne cache rien, nous livre ses sentiments les plus noirs sans tenter de les atténuer à aucun moment. Oui il a pris énormément de temps à accepter la trisomie de sa fille. Oui il a fallu des mois pour qu’il arrive à faire des gestes aussi simples en apparence que de donner un bain ou faire un câlin. Il ne s’en cache pas du tout que du contraire…
« Ça faisait maintenant presque trois mois que Julia était née et je ne lui avais encore jamais donné de bain, ni ne m’étais vraiment occupé d’elle comme un père s’occupe de son enfant…
Je ne l’avais jamais prise dans mes bras ni ne lui avais chanté de chansons…
Alors que pour Louise, je m’étais impliqué avec bonheur dès sa naissance.
Je me sentais coupable…
[…]
Je n’arrivais pas à ressentir quelque chose pour elle…
Est-ce qu’un jour je l’aimerai comme ma fille ?
Est-ce que j’arriverai à la voir autrement que comme une trisomique ? »
Sur ce sujet ô combien difficile, l’auteur parvient tout de même à nous arracher 2-3 sourires, parfois des rires même, entre les montées de larmes…
Il y aurait énormément de choses à dire sur cette bande dessinée mais j’en retiens pour ma part principalement deux…
D’abord, la réaction la plus saine est finalement celle de Louise, la grande sœur de Julia. Pour elle, Julia est un bébé comme un autre, c’est sa petite sœur, elle est super contente de son arrivée et déjà fière d’être grande sœur.
La deuxième c’est une des planches de la bd à laquelle je repense souvent. Le dessinateur représente une petite promenade familiale avec la poussette dans laquelle se trouve Julia. Puis il décrit les réactions des passants à leur passage. D’abord, il y a un regard vers la poussette parce que tout le monde ou presque est toujours attiré par les bébés. Puis il y a ce moment d’incompréhension qui se lit sur leur figure à la vue du visage trisomique. Ensuite, il y a ce moment où les passants jettent un œil sur les parents pour essayer de comprendre. Comme s’ils cherchaient à percevoir dans les visages des parents l’origine de la trisomie du bébé qu’ils viennent de regarder… L’auteur nous explique combien c’est douloureux pour les parents de subir, au quotidien, ce genre de regards, sans doute involontaires et inconscients mais néanmoins pénibles…
Un petit mot aussi sur le graphisme magnifique : les planches sont en bichromie et chaque chapitre comporte une couleur dominante, reflet des émotions principales de l’auteur… Tout tout beau…
Au final donc, un récit sublime sur la différence, le rejet, l’incompréhension, les angoisses parentales, l’amour…
« Ce n’est pas toi que j’attendais.
Mais je suis content que tu sois venue… »
Je garde mon deuxième conseil lecture pour le mois prochain histoire de ne pas vous faire attendre une année de plus pour le lire ! Donc, comme dirait l’autre : « C’est tout… pour le moment ! ».
Laisser un commentaire